À Eumène Queillé.
I
IL est un grand tombeau dont l’horreur me poursuit,
Large, froid, et peuplé de silences funèbres :
- C’est l’immense tombeau qu’ouvre sur nous la nuit
Dans l’azur dilaté par l’effroi des ténèbres.
Comme des jours furtifs où glisse la pâleur
D’un ciel d’or très lointain, au travers d’un mur sombre,
Les étoiles, filtrant leur clarté sans chaleur,
Blanches, rompent parfois la tristesse de l’ombre.
Des réveils immortels nous mesurant l’espoir,
Rares, ces mornes feux dont la lumière tremble
Luisent, sans l’éclairer, dans le sépulcre noir
Dont nous sommes les morts et les vers tout ensemble.
Des étoiles fuyant le choeur silencieux,
Parmi les trépassés trépassé solitaire,
Pour pardonner aux nuits l’épouvante des cieux
J’attends qu’un Dieu nouveau, pitoyable à la terre,
Ainsi qu’un fossoyeur, les deux bras étendus,
Ferme ce vide horrible, et, de sa main géante,
Versant dans l’éther creux un flot d’astres perdus,
Comble avec des soleils sa profondeur béante !
II
COMME une vaste cible où pleut le fer des lances,
Criblé sous les regards des chercheurs inconnus,
Le firmament, déchu des antiques silences,
Pleure le sang divin d’Hermès et de ,Vénus.
O mythes glorieux, qu’êtes-vous devenus ?
Du Beau que nous servons éternelles semences !
Devant un peuple obscur d’astres nouveaux venus,
La foule olympienne a fui les cieux immenses.
Trahissant le secret de sa limpidité,
Pour montrer son trésor inerte de clarté
L’azur a déchiré la pudeur de ses voiles,
Et l’homme, revenu de son rêve orgueilleux,
Après avoir compté le troupeau des étoiles,
Prend en pitié le ciel qu’ont déserté les dieux.
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