Doria, ou quand une femme s’impose dans le rap game

Publié le: 06/07/2020 16:42
Mis à jour le: 05/10/2020 12:27
Elle vient renverser tous les clichés des femmes dans le rap, la jeune rappeuse de Nanterre est une véritable étoile montante dans la scène rap française.

Son nom vous a forcément interpelé sur le dernier album de Jul, La machine. Doria, jeune rappeuse venue de Nanterre fait parler d’elle depuis cette collaboration avec l’Ovni de Marseille, qui lui a offert pas mal de visibilité, et il faut dire que c’est mérité. Son apparition a mis tout le monde d’accord.

 

Le grand public la connait depuis quelques semaines à peine, mais Doria est loin de sortir de nulle part. La jeune femme a déjà un certain bagage derrière elle, avec une carrière musicale qui débute en 2017 avec des morceaux qui n’ont rien en rapport avec ce que l’on entend d’elle aujourd’hui : plutôt axée pop urbaine, avec de l’autotune à foison et des sonorités très ensoleillées, la jeune femme à cette époque chantait encore, avant de progressivement s’aventurer dans le rap, elle qui se dit influencée par Diam’s et Booba.

 

Et c’est à ce moment là qu’elle se fait remarquer. Fianso l’invite à une session de son célèbre Rentre dans le cercle, où elle impressionne l’assemblée, avant de faire un passage dans un Planète Rap. Outre ces apparitions, la jeune rappeuse a comme terrain de jeu préféré les réseaux sociaux, où elle apprécie particulièrement interagir avec ses fans et poster régulièrement des freestyles, notamment depuis le siège de sa voiture. Elle sort ainsi son premier EP, MDP, constitué de ses freestyles et de ce titre, Pochtar, qui la révèle à un public plus large puisque le titre atteint 2,4 millions de vues sur Youtube. Décidément, dans ce milieu d’hommes, Doria s’impose avec une aisance admirable. Ce point, elle ne s’en vante pas vraiment puisqu’elle considère que les clivages entre disciplines musicales en fonction des genres n’a pas de raison d’être. Selon ses mots, « Les femmes ont toutes leur place dans le rap ».

 

« Pas d'confiance, pas de tes-traî, pas de 'blèmes, pas de secrets / Pas de haine, pas de fausseté, l'temps d'un soir, j'vais m’isoler »

 

La recette de Doria ? Des instrus à l’ancienne, qui ne cèdent pas aux tendances actuelles, avec ceci dit une pointe de modernité dans son usage maîtrisé de l’autotune, le tout exprimé au travers de lyrics authentiques. Car Doria tient à rester elle-même, et ne jamais céder aux tendances éphémères pour se fondre dans une case.

 

« Alors en lettres, j'voulais aller parce que je savais que gratter / Moi, à seize ans, je passe le BAFA, première paye, j'achète une baffe / Premier mec, j'me mange une baffe donc l'amour, moi, j'ai vite lâché, eh »

 

Et cette authenticité, elle la traduit au travers de storytellings de sa propre vie. Doria est formelle, tout ce qu’elle écrit dans ses textes est le récit de son vécu, de son expérience, rien n’est inventé pour façonner un quelconque pseudo-personnage. Son dernier single, Tempo, annonce la couleur, avec cette cover : une photo de Doria en noir et blanc dans son enfance. Elle y expose ses difficultés, ses peines, les obstacles qu’elle a rencontrée dans la vie, et son attache au quartier, des thèmes assez récurrents dans ses morceaux.

 

En somme, Doria a su montrer ces dernières années une véritable polyvalence. Jamais intimidée par ses homologues masculins, la jeune femme a un sang-froid sans égal, et inspire un respect profond. On ose espérer voir ce jeune talent briller sous peu, afin qu’elle puisse donner l’exemple à d’autres amatrices qui hésiteraient encore à se lancer dans le rap, un milieu que l’on sait très misogyne.

 

Yassmine Haska