J'ai été Espagnol, moi. Ah oui, je dansais avec des castagnettes. Alors, comme j'en voulais des vraies, n'est-ce pas, des bonnes, je m'étais dit "Je vais aller en chercher en Espagne". Alors, j'avais été jusqu'à Bilbao puis je revenais à pied vers les Pyrénées parce que je voulais les passer en fraude, mes castagnettes.
Alors, en cours de chemin, je vois une voiture qui passait par là. Je me dis "Je vais l'arrêter, ce sera toujours ça de moins à faire à pied". Je ne parlais pas espagnol mais je lui ai fait comme ça "Stop, stop !".
Alors il a bien compris, n'est-ce pas, et il a arrêté. Alors je lui ai dit - parce que je parle un petit peu français...euh, pas français mais espagnol - je lui dis "Baillassé à Francia ? " (Allez-vous en France ?). Alors, il me dit "Si".
Je lui répond "Okay", vu que je parlais plusieurs langues, n'est-ce pas. Alors, je suis monté avec lui, puis pendant tout le trajet on a parlé espagnol.
Il me disait " Francia lèros... lèros". Moi, je croyais que ça voulait dire les roses. Mais c'était pas ça, ça voulait dire loin, comme ça. Il faisait ça avec sa main, loin, comme ça. Alors, j'ai bien vu que ça voulait dire loin
parce que... puis pour dire bas, il faisait comme ça, bas, avec sa main, bas. Puis pour dire haut, il faisait haut comme ça avec sa main puis pour dire large, il faisait large comme ça avec sa main. Alors, comme j'ai des facilités pour les langues, vous pensez bien, je comprenais tout de suite.
Alors, on a parlé espagnol pendant trois ou quatre heures comme ça. Alors, à un moment, il s'est retourné vers moi puis il me dit
"Vous, Monsieur, Français ?". Ben, je dis oui ! Il me dit "Moi aussi". Oh oh ! C'est bête, hein ! Et je l'avais pris pour un Espagnol puis lui aussi, oh oh oh !
Après ça, ben, on a continué notre chemin, mais on ne parlait plus espagnol. C'était pas la peine puisqu'on ne savait pas.
Mais alors, nous voilà arrivés à la douane. Alors, je me suis dit "Là, les douaniers, ils vont me prendre mes castagnettes" Mais j'ai eu une idée, ainsi, parce que j'ai toujours des idées, comme ça : Je les ai mises sur le siège et puis je me suis assis dessus. J'ai dit "Comme ça, ils ne vont pas me les prendre, ils vont pas les voir". Mais j'ai eu tellement peur, je me suis mis à trembler que les castagnettes, elles jouaient toutes seules. Alors, quand j'ai vu ça, je suis parti en galopant. J'en ai pas eu pour longtemps.
Mais après ça, la nuit est venue, alors, vous savez, dans les montagnes des Pyrénées, par une nuit sans lune, vous savez, j'étais embarrassé. Je savais bien qu'il fallait passer par un col, mais quel col ?
Vous savez, là-bas, c'est des cols raides, vous savez, c'est des cols montants. Puis c'est toujours la même chose, on m'avait dit que les douaniers, vous savez, ils repoussent ceux qui veulent passer par les cols. Alors, moi, comme je savais qu'ils repoussaient du col, moi, j'avais peur de leur demander un renseignement. Ah oui, j'étais embarrassé !
J'avais bien entendu dire "Si tu te trouves perdu dans la nuit et que tu n'aies pas de boussole, dirige-toi avec le grand chariot et puis le petit chariot" Mais, là-bas il en passait jamais.
Alors, pensez, j'étais embarrassé. Puis toute la nuit, j'avais entendu des mugissements, j'avais entendu "Meuh ! Meuh !". C'était la ménagerie du cirque Gavarnie, parce qu'il y a un cirque là-bas. Heureusement que je le savais, sans ça, j'aurais eu peur ! Ha ha ! Je le savais alors je m'en foutais pas mal !
J'ai marché, j'ai marché, je me suis retrouvé en France sans m'en rendre compte. J'étais content parce que je me dis "J'ai toujours pas été en Espagne pour rien". Parce qu'elles étaient belles, mes castagnettes. Puis on voyait bien qu'elles étaient spéciales parce que dans le coin c'était écrit "Made in France"
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