C???II [=CXXIII] .
Vaincre elle sçait hommes par sa valeur,
Et par son sens l’oultrageuse Fortune:
Et toutesfoys ne peult a mon malheur
Remedier, se voyant opportune
Pour bienheurer trop plus grand’ infortune,
Laissant mon cas suspendre a nonchaloir.
Mais si des Cieulx pour me faire douloir,
A tous benigne, a moy est inhumaine,
De quoy me sert mon obstiné vouloir?
Contre le Ciel ne vault deffence humaine.
C???III [=CXXIIII] .
Si Apollo restrainct ses raiz dorez,
Se marrissant tout honteux soubz la nue
C’est par les tiens de ce Monde adorez,
Desquelz l’or pur sa clarté diminue.
Parquoy soubdain, qu’icy tu es venue,
Estant sur toy, son contraire, envieux,
A congelé ce Brouas pluvieux,
Pour contrelustre à ta divine face,
Mais ton tainct frais vainct la neige des cieulx,
Comme le jour la clere nuict efface.
C???IIII [=CXXV] .
Ensevely long temps soubz la froideur
Du Marbre dur de ton ingratitude,
Le Corps est jà en sa foible roideur
Extenué de sa grand’ servitude:
Dont ame, & coeur par ta nature rude
Sont sans mercy en peine oultrepassez.
O aujourd’huy, bienheureux trespassez,
Pour vostre bien tout devot intercede:
Mais pour mes maulx en mon tourment lassez
Celle cruelle, un Purgatoire excede.
C???V [=CXXVI] .
A l’embrunir des heures tenebreuses,
Que Somnus lent pacifie la Terre.
Ensevely soubz Cortines umbreuses,
Songe a moy vient, qui mon esprit desserre,
Et tout aupres de celle là le serre,
Qu’il reveroit pour son royal maintien.
Mais par son doulx, & privé entretien,
L’attraict tant sien, que puis sans craincte aulcune
Il m’est advis, certes, que je la tien,
Mais ainsi, comme Endimion la Lune.
C???VI [=CXXVII] .
L’esprit, qui fait tous tes membres movoir
Au doulx concent de tes qualitez sainctes,
A eu du Ciel ce tant heureux povoir
D’enrichir l’Ame, ou Graces tiennent ceinctes
Mille Vertus de mille aultres enceinctes,
Comme tes faictz font au monde apparoistre.
Si transparent m’estoit son chaste cloistre
Pour reverer si grand’ divinité,
Je verrois l’Ame, ensemble & le Corps croistre,
Avant leur temps, en leur eternité.
C???VII [=] .
Ce bas Soleil, qui au plus hault fait honte,
Nous à daingné de sa rare lumiere,
Quand sa blancheur, qui l’yvoire surmonte,
A esclercy le brouillas de Fourviere:
Et s’arrestant l’une, & l’aultre riviere,
Si grand’ clarté s’est icy demonstrée,
Que quand mes yeulx l’ont soubdain rencontrée,
Ilz m’ont perdu au bien, qui seul me nuict.
Car son cler jour serenant la Contrée,
En ma pensée a mys l’obscure nuict.
C???VIII [=CXXIX] .
Le jour passé de ta doulce presence
Fust un serain en hyver tenebreux,
Qui fait prouver la nuict de ton absence
A l’oeil de l’ame estre un temps plus umbreux,
Que n’est au Corps ce mien vivre encombreux,
Qui maintenant me fait de soy refus.
Car dès le poinct, que partie tu fus,
Comme le Lievre accroppy en son giste,
Je tendz l’oreille, oyant un bruyt confus,
Tout esperdu aux tenebres d’Egypte.
C???IX [=C???] .
Tant me fut lors cruellement piteuse
L’affection, qui en moy s’estendit,
Que quand la voix hardie, & puis honteuse
Voulut respondre, un seul mot ne rendit:
Mais, seulement souspirant, attendit,
Que lon luy dist: ou penses tu attaindre?
Ainsi veoit on la torche en main s’estaindre,
Si en temps deu on laisse a l’esmovoir,
Qui, esbranlée un bien peu, sans se faindre
Fait son office ardent a son povoir.
CXL [=C???I] .
Delia ceincte, hault sa cotte attournée,
La trousse au col, & arc, & flesche aux mains,
Exercitant chastement la journée,
Chasse, & prent cerfz, biches, & chevreulx maints.
Mais toy, Delie, en actes plus humains
Mieulx composée, & sans violentz dardz,
Tu venes ceulx par tes chastes regardz,
Qui tellement de ta chasse s’ennuyent:
Qu’eulx tous estantz de toy sainctement ardz,
Te vont suyvant, ou les bestes la fuyent.