A Eugène Ledrain.
Aux jardins fleuris de lauriers roses
Et parmi les vasques
Où tombent les doux pleurs des fontaines
Echappées au rire hiératique
Des masques,
Hélène, aux yeux charmants, promène
Une indolente songerie.
Par instants, elle s’arrête
Près des blancs gradins
Menant des jardins fleuris
Dans l’ancestral palais de Priam;
Et cueille, distraite,
Les odorantes roses.
Dont les lourds bouquets s’épanchent
Vers les blancs gradins;
Ainsi, le flot rose d’un vin de Syracuse
S’épanche des cratères pleins,
Que des mains ivres inclinent.
Sa tunique d’azur délicat
Est retenue
Sur l’épaule nue
Couleur de colombe
Par de riches agrafes ouvrées.
Et sur ses pieds blancs,
Comme la blanche laine des agneaux
Tombent les plis droits et souples
De sa tunique d’azur délicat.
* *
Le tumulte lointain du combat,
Qui jette sur la terre sanglante
Les héros mourants sous les murs de Troie; -
Parmi le bruit terrible des boucliers
Et des lances heurtées; -
Le tumulte lointain du combat
Arrive confus: -
Tel un grondement d’écluses ouvertes
Précipitant les ondes
D’un fleuve furieux. -
Hélène, avec une nonchanlante grâce, s’est assise
Sur le marbre pâle d’un banc réfugié
Dans l’ombre des lauriers roses;
Et, tandis que sa main enfantine mêle
A ses beaux cheveux les odorantes roses,
Elle rêve, l’oreille vaguement importunée
Par le tumulte lointain du combat.