Flambeaux Latoniens, qui d’un chemin divers
Or’ la nuict, or’ le jour guidez par l’Univers,
Peres du temps ailé, sus, hastez vos carrieres,
Franchissez vistement les contraires barrieres
De l’aube et du ponant : et par vostre retour
L’imparfait Univers faites plus vieil d’un jour.
Vous poissons, qui luisez dans l’escharpe estoilee,
Si vous avez desir de voir l’onde salee
Fourmiller de poissons, priez l’astre du jour
Qu’il quitte vistement le flo-flotant sejour :
S’il veut qu’en refaisant sa course destinee
Vous le logiez chez vous un mois de chasque annee.
Et toy, Pere eternel, qui d’un mot seulement
Acoises la fureur de l’ondeux element :
Toy qui, croulant le chef, peux des vents plus rebelles
Et les bouches bouscher, et desplumer les ailes :
Toy grand Roy de la mer, toy dont les hameçons
Tirent vifs les humains du ventre des poissons :
Pourvoy moy de bateau, d’Elice, et de pilote,
Afin que sans peril de mer en mer je flote.
Ou plustost, ô grand Dieu, fais que, plongeon nouveau,
Les peuples escaillez je visite sous l’eau :
Afin que degoutant, et chargé de pillage
Je chante ton honneur sur le moite rivage