Ah ! portons dans les bois ma triste inquiétude.
Ô Camille ! l’amour aime la solitude.
Ce qui n’est point Camille est un ennui pour moi.
Là, seul, celui qui t’aime est encore avec toi.
Que dis-je ? Ah ! seul et loin d’une ingrate chérie,
Mon coeur sait se tromper. L’espoir, la rêverie,
La belle illusion la rendent à mes feux,
Mais sensible, mais tendre, et comme je la veux
De ses refus d’apprêt oubliant l’artifice,
Indulgente à l’amour, sans fierté, sans caprice,
De son sexe cruel n’ayant que les appas.
Je la feins quelquefois attachée à mes pas ;
Je l’égare et l’entraîne en des routes secrètes ;
Absente, je la tiens en des grottes muettes…
Mais présente, à ses pieds m’attendent les rigueurs,
Et, pour des songes vains, de réelles douleurs.
Camille est un besoin dont rien ne me soulage ;
Rien à mes yeux n’est beau que de sa seule image.
Près d’elle, tout, comme elle, est touchant, gracieux ;
Tout est aimable et doux, et moins doux que ses yeux ;
Sur l’herbe, sur la soie, au village, à la ville,
Partout, reine ou bergère, elle est toujours
Camille, Et moi toujours l’amant trop prompt à s’enflammer,
Qu’elle outrage, qui l’aime, et veut toujours l’aimer.