On espère ne pas vous l’apprendre, mais le rap apparaît dans les ghettos noirs des États-Unis, dans les années 80. On a l’exemple en 1979 de Rapper’s Delight, du Sugar Hill Gang qui sont considérés comme des pionniers dans le domaine. Le clash, lui, vient de l’art des “dozens” : des joutes verbales entre détenus aux States et ce concept est lui-même tiré de l’esclavage. Son histoire n’est donc pas rose et explique le phénomène. Le concept plaît énormément notamment quand les insultes dépassaient la raison, on appelait ça à l’époque les “dirty dozens”.
À côté des « clashs », le rap évolue dans son ensemble. On aperçoit une professionnalisation et surtout des MC de plus en plus qualitatif. Avec le temps, les styles s’améliorent et les insultes laissent place à des attaques plus fines, mieux pensées. L’ensemble contribue à donner un cachet artistique au rap, et on retrouve plus que des simples insultes, avec des vrais morceaux de rap.
Ensuite, on passe des dozens aux diss tracks. Les clash dans les prisons fusionnent logiquement avec le rap. La plupart des détenues qui pratiquaient les dozens sont devenus désormais des rappeurs. Le résultat ? Des morceaux uniquement destinés à clasher un adversaire et le réduire à néant afin de lui faire perdre toutes crédibilités et lui faire perdre sa street-cred. La paternité du terme reviendrait à LL Cool J et proviendrait de l’anglais “to disrespect”, qui signifie “manquer de respect”. Mais même aujourd’hui, personne ne sait qui a pondu vraiment le premier diss track. L’important est ailleurs et un mouvement est né.
Néanmoins on peut apparenter la saga Roxanne à la naissance du diss, du moins la saga représente ce qu’est et ce que ça va être les clashs.
En 1984, c’est le début des Roxanne Wars, un événement qui va tout changer dans le rap, et même dans le monde.
Les Roxanne Wars sont une longue série de diss tracks partie du groupe UTFO. Pour faire simple, en 1984 le groupe UTFO sort le titre “Roxanne, Roxanne”. Le groupe se plaint d’une femme fictive nommée Roxanne. Un morceau qui passe au début plutôt inaperçu. Le groupe devait donner un concert à une soirée organisée Rap Attack, mais se désiste au dernier moment. Le média n’apprécie pas et décide de contre-attaquer. C’est à ce moment-là que Lolita Shanté Gooden a fait son apparition. Shanté et Marley Marl, de Rap Attack enregistrent un track en guise de revanche contre UTFO.
Marley Marl copie le beat de Roxanne, Roxanne. Le titre est pensé comme un beef et on retrouve Shanté dans la peau de Roxanne. Elle explique avoir repoussé les avances des membres d’U.T.F.O., pas assez bons pour elle.
Au total, le titre est enregistré en sept petites minutes et une seule prise.
Le morceau est d’abord pressé à 100 copies distribuées dans New York. Au final, Roxanne’s Revenge se vend à plus de 250.000 copies rien que dans NY et devient le premier clash médiatisé du rap et c’est une femme qui a gagné. Tout un symbole.
Depuis le clash, est connu de tous et a fait l’histoire du rap. On ne compte pas 1 mois sans un règlement de compte musicale ou pire.
Vous savez maintenant l’histoire du début des clashs dans le rap. Mais ce qui a fait la légende du rap est le clash West Coast - East Coast qui a complètement changé la face du hip-hop et du monde.
En 1994, Shakur échappe d’une fusillade à New-York. 2PAC prend 2 balles dans la tête, et accuse le label de Puff Daddy d’avoir organisé son assassinat. Biggie rajoute de l’huile sur le feu en sortant le morceau Who Shot Ya ?. Le track est un aveu à peine caché de sa participation dans l’assassinat loupé. 2Pac répond en juin 1996, avec le classique Hit ‘Em Up. Biggie aurait sûrement préféré que l’artiste décède avant. Le diss est juste mémorable et est un vrai classique de la musique. Le célèbre rappeur tire en musique sur tous les membres du label de Puff Daddy. Mais Shakur ne s’arrête pas là, et clame également avoir couché avec la femme de Notorious B.I.G. Un diss mémorable qui finira dans des mares de sang malheureusement.
Avec la mort de Biggie en 1997, les clashs ne s’arrêtent pas et après la dualité West-East COAST, on voit de nombreuses rivalités éclore aux seins mêmes des villes. Nas et Jay-Z veulent devenir les nouveaux rois de NY et ils se déclarent la guerre. Le duel entre les 2 aboutira à des morceaux comme Ether, de Nas qui sont des classiques absolus.
On a bien sûr eu le clash entre Drake et Pusha-T ou comment ne pas évoquer Eminem le roi de la rime ou encore Sixnine et ses lives Instagram. Le rap a toujours été lié intimement au clash et on peut s’en réjouir quand cela reste musical, digital ou dans la légalité. Néanmoins les clash c’est aussi de la violence, des morts et du sang.
Récemment bons noms de talentueux rappeurs sont plus ou moins décédés à cause de clash entre gangs. La liste et longue et presque interminables. On peut revenir sur l’altercation entre Gucci Mane et Jeezy. Les 2 rappeurs étaient pourtant de base en bon terme. Il avait même collaboré . Selon les rumeurs une séance studio se serait mal passée et la suite appartient à la triste histoire du rap. Jeezy avait proposé 10 000 dollars à celui qui arriverait à lui ramener la chaîne de Gucci Mane. La « rançon » dégénère et Gucci finit par assassiner l'un des potes de Jeezy venu lui voler sa chaîne. Le meurtre n’a pas semblé toucher Gucci qui a continué de tailler Jeezy dans ses rimes.
Le clash est un art et il a sa place dans le rap, surtout quand il apporte des morceaux iconiques et légendaires. La musique est du divertissement et le clash fait vendre l’Amérique l’a bien compris. Nonobstant l’art de la rime si les seules balles envoyées pouvaient rester dans les stylos, le monde se porterait mieux. Les Américains ne sont pas les seules à être à avoir eu une histoire des clash aussi folles et le rap français a su aussi proposer des moments d’anthologies.... Mais c’est une autre histoire.