À Marcel Schwob.
Va, tu sais à présent que Gallus est un sage.
José-Maria de Heredia.
Il s’occupe des travaux de la terre et taille
les haies, ramasse le blé et les figues qui bâillent.
Il a un pavillon dans sa vigne, et il goûte
le vin en bois aigre qu’il examine au jour.
Un lièvre lui mange les choux dans son jardin
où quelques rosiers sont lourds de pluie, le matin.
Parfois on lui apporte un acte notarié,
un paysan, pour savoir comment être payé.
Il nettoie son fusil et couche avec sa bonne.
Il fit son droit jadis.
Une photographie
nous le montre triste, pommadé et jauni,
à l’époque de son duel pour une femme.
Il tient un journal à la main et regarde
devant lui.
Que c’est triste, que c’est triste,
je trouve, ce temps où on se nommait Évariste.
Le vieux père et la mère étaient au désespoir
On avait surpris une lettre de femme, un soir
Un jour, il est revenu de la capitale
avec un chou de cheveux sur son front pâle.
On a enterré les vieux parents qu’il aimait,
et dont il parle avec un touchant respect.
Il n'a pas d’héritiers et sa succession,
qui sera belle, sera partagée, dit-on,
entre les Dumouras et les Cosset. Qui sait ?
Il vit ainsi, auprès des chênes, et c’est
de longues veillées qu’il passe à la cuisine
où dort le chien rose de feu, où les mouches
salissent de cacas tout ce qu’elles touchent.
Parfois, le matin, il s’essaye à un trombone
triste auquel est habituée sa bonne.
Il vit ainsi doucement, sans savoir pourquoi.
Il est né un jour. Un autre jour il mourra.
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