Elle changeait les draps de l’hôtel
Les traces de doigts sur les poubelles
Petite hirondelle au milieu des corbeaux
Elle chantait « Desperado »
Moi, j’avais du retard sur le sommeil
Je m’étais fait doubler par le soleil
Elle, de l’autre côté du couloir
Elle faisait chanter les miroirs
J’ai passé une heure de sa vie
Une heure sous le soleil d’Algérie
Sous la course des planètes
Y’a des moments qu’on regrette
Derrière ses paupières mi-closes
Tu voyais plus de gris que de rose
Quand je suis parti, j’ai bien compris
Que je perdais quelque chose
Ces enfants qui font rien à l’école
Et qui ont les poches pleines de tubes de colle
De toute façon, personne ne t’aide
Quand tu t’appelles Saïd ou Mohamed
C’est le ciel en tôle ondulée pour toujours
C’est la fenêtre sur la troisième cour
C’est le cri des voisines plein les oreilles
Et les heures de mauvais sommeil
Mais, s’il y a quelqu’un autour qui comprend
Le mauvais français, le musulman
Sous la course des planètes
Ça serait bien qu’il s’inquiète
Avant que ses paupières n’explosent
Et qu’elles prennent ce gris en overdose
Quand je suis parti j’ai bien compris
Qu’on y pouvait quelque chose
Toi t’envoies dix francs
Pour les enfants du Gange
Parce que t’as vu des photos qui dérangent
T’envoies dix francs
Pour les enfants d’ailleurs
Parce que t’as vu des photos qui font peur
Et elle que tu croises en bas de chez toi
Elle que tu croises en bas de chez toi
Depuis je suis retourné à Marseille
Ses amis n’ont pas de nouvelles
Y a trop d’hirondelles
Ou trop de corbeaux
Elle a dû changer de ghetto
Moi, je crois plutôt qu’elle
Change les draps d’un autre hôtel
D’autres traces de doigts
Sur d’autres poubelles
De l’autre côté d’un autre couloir
Elle doit faire chanter les miroirs
Chanter les miroirs...
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