Dans la lanière de prière blanche
Paul Celan

Poème Dans la lanière de prière blanche

Le Seigneur de cette heure
était
une créature d’hiver, c’est
pour lui plaire
qu’est arrivé ce qui est arrivé –
ma bouche en grimpant s’est accrochée avec les dents, une fois encore
quand elle t’a cherchée, toi, trace de fumée,
là-haut,
silhouette de femme,
toi en voyage vers mes
pensées de feu dans le gravier noir
au-delà des mots de fission à travers
lesquels je t’ai vue marcher, haut
perchée sur tes jambes avec
ton opiniâtre tête aux lèvres
lourdes
sur le corps
tenu vivant par mes
mains
mortellement précises.

Dis à tes
doigts qui t’accompagnent
jusqu’aux gouffres, combien
je t’ai connue, combien je t’ai
poussée loin dans les profondeurs, où
mon rêve le plus amer
a de cœur couché avec toi, dans le lit
de mon inarrachable nom