Immortalité
Louisa Siefert

Poème Immortalité

C'était au lieu d'un chêne une forêt nouvelle.
VICTOR DE LAPRADE

Le chêne dans sa chute écrase le roseau,
Le torrent dans sa course entraîne l'herbe folle ;
Le passé prend la vie, et le vent la parole,
La mort prend tout : l'espoir et le nid et l'oiseau.

L'astre s'éteint, la voix expire sur les lèvres,
Quelqu'un ou quelque chose à tout instant s'en va.
Ce qui brûlait le coeur, ce que l'âme rêva,
Tout s'efface : les pleurs, les sourires, les fièvres.

Et cependant l'amour triomphe de l'oubli ;
La matière que rien ne détruit se transforme ;
Le gland semé d'hier devient le chêne énorme,
Un monde nouveau sort d'un monde enseveli.

Comme l'arbre, renaît le passe feuille à feuille,
Comme l'oiseau, le coeur retrouve sa chanson ;
L'âme a son rêve encore et le champ sa moisson,
Car ce que l'homme perd, c'est Dieu qui le recueille.

Champollon, septembre 18