Quand de pâles amants, l’extase étant finie,
Ont la sensation d’une heureuse agonie
Et qu’éveillés à peine et doucement brisés
Ils sentent un vol blanc d’immatériels baisers,
Si l’aube envahissante à ce moment pénètre,
C’est comme une faux d’or à travers la fenêtre
Coupant les blés du rêves et les fleurs du plaisir !
Et quand le couple triste a pu se ressaisir
Il songe, en entendant le bruit vain de la rue,
Qu’il faudra de nouveau rentrer dans la cohue,
Tandis qu’on est amer, coudoyer des gens gais,
Étreindre un peu de vent dans ses bras fatigués,
Récrire encor son nom sur les pages du livre,
Qu’il faudra de nouveau recommencer à vivre !
Et soudain, comme épris d’un rêve illimité,
Eux qui veulent, vivants, vivre d’éternité,
Les amants délicats que le jour effarouche
Dans un nouveau baiser ont rapproché leur bouche
Pour ne pas revêtir leurs manteaux, lourds d’ennui,
Et, fermant les rideaux, ils refont de la Nuit !