Désormais que le renouveau
Fond la glace et dessèche l'eau
Qui rendent les près inutiles,
Et qu'en l'objet de leurs plaisirs
Les places des plus grandes villes
Sont des prisons à nos désirs;
Que l'oiseau, de qui les glaçons
Avaient enfermé les chansons
Dans la poitrine refroidie,
Trouve la clef de son gosier
Et promène sa mélodie
Sur le myrte et sur le rosier;
Que l'abeille, après la rigueur
Qui tient ses ailes en langueur
Au fond de ses petites cruches,
S'en va continuer le miel,
Et quittant la prison des ruches,
N'a son vol borné que du ciel;
Que les zéphyres s'épanchant
Parmi les entrailles des champs
Lâchent ce que le froid enserre;
Que l'Aurore avecque ses pleurs
Ouvre les cachots de la terre
Pour en faire sortir les fleurs;
Que le temps se rend si bénin
Même aux serpents pleins de venin
Dont notre sang est la pâture;
Qu'en la faveur de la saison
Et par arrêt de la nature
Il les fait sortir de prison;
L'an a fait plus de la moitié
Que tous les jours votre pitié
Me doit faire changer de place:
Ne me tenez plus en suspens,
Et me faites au moins la grâce
Que le ciel fait aux serpents.
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