Ô Passé, miroir bleuâtre,
Qu’il ne faut pas trop pencher ;
Pauvre drame de théâtre
Qu’on ne peut plus retoucher…
Le jardin avait des arbres
Qui, tous, fleurissaient soudain ;
Et les fleurs jonchaient les marbres
Qui logeaient dans le jardin.
Quel enchantement demeure
Dans le parc extasié ?
Est-ce le parfum d’une heure ?
Ou le parfum d’un rosier ?
Quel est ce rêve ineffable,
Qui se cache au coin d’un bois ?
Est-ce une lettre, une fable ?
Ou le refrain d’une voix ?
Un agneau couleur de neige
Passe dans l’air étonné
En disant : « Comment l’aurais-je
Su si je n’étais pas né ?… »
Chaque souvenir ressemble
À l’instant qui lui fait mal…
Quel est ce tulle qui tremble ?
C’est une robe de bal.
La valse qui veut renaître
S’aventure en chancelant…
Fallait-il à la fenêtre
Pencher un cœur si brûlant ?
La rose qu’on croyait morte
Vient de refleurir soudain…
Fallait-il ouvrir la porte
Qui donnait sur ce jardin ?
Les minutes les plus folles
Font danser des coins de ciel…
Fallait-il, sur des paroles,
Construire un rêve éternel ?
Dans l’ombre de la mémoire
Quel désordre et quel danger !
C’est un peu comme une armoire
Que l’on voudrait mieux ranger…
Fallait-il, sur cette route,
Suivre un vent passionné ?…
Non, peut-être… Mais, sans doute,
Peut-il être pardonné
Le cœur à la tendre écorce
Qui, du matin jusqu’au soir,
Fit, avec sa faible force,
Tout ce qu’il pouvait pouvoir !
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