Quittons la léthargie heureuse des maisons,
Le carmin des rosiers et le parfum des pommes
Et les vergers où meurt l’ondoiement des saisons,
Car nous ne sommes plus de la race des hommes.
Nous irons sous les ifs où s’attarde la nuit,
Où le souffle des Morts vole, comme une flamme,
Nous cueillerons les fleurs qui se fanent sans fruit,
Et les âcres printemps nous mordront jusqu’à l’âme.
Viens : nous écouterons, dans un silence amer,
Parmi les chuchotis du vêpre à l’aile brune,
Le rire de la Lune éprise de la Mer,
Le sanglot de la Mer éprise de la Lune.
Tes cheveux livreront leurs éclairs bleus et roux
Au râle impérieux qui sourd de la tourmente,
Mais l’horreur d’être ne ploiera point nos genoux
Dans nos yeux le regard des Succubes fermente.
Les hommes ne verront nos ombres sur leurs seuils
Qu’aux heures où, mêlant l’ardeur denos deux haines,
Nous serons les Banshees qui présagent les deuils
Et les Jettatori des naissances prochaines.
Nos corps insexués s’uniront dans l’effort
Des soupirs, et les pleurs brûleront nos prunelles.
Nous considérerons la splendeur de la Mort
Et la stérilité des choses éternelles.
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