Elles vont, trottant de boutique en boutique, en bavardant
Elles n'ont jamais peur de perdre leur temps
Devant l'église, elles s'arrêtent sans entrer
Parce qu'elles n'ont plus rien à demander
Elles sont émues par un chat, un bébé
Les vieilles dames à qui je veux ressembler
Je ne sais pas comment elles font pour tricoter le temps
Pour tricoter tous leurs anciens tourments
Un jour, ont-elles été jeunes et jolies
Ont-elles espéré un pas dans la nuit
Ouvert une lettre qui a tout détruit
Ont-elles pleuré comme je pleure aujourd'hui ?
Vieille
Si déjà je pouvais être vieille
Pour qu'enfin ma douleur s'ensommeille
Vieille
Pour que le vent de la nuit balaye
Les soucis, les erreurs de la veille
Vieille
C'est vers le soir que l'on s'émerveille
Mais je n'en suis encore qu'à midi
Elles vont, trottant de mémoire en méprise, en évoquant
Ce qu'elles ont vu, ce qu'elles croient être vrai
À l'heure du thé, elles peuvent bien inventer
Y a plus personne pour le leur reprocher
Est-ce que leurs mains, un jour, ont caressé
D'autres vivants que le chat dans l'entrée ?
Je ne sais pas si elles portent un masque sur leurs secrets
Ou si elles ont vraiment tout oublié
Il n'y a plus d'histoire à déchiffrer
Sur ces visages où tout s'est effacé
Sur mon visage, que lira-t-on demain ?
Peut-on garder l'amour sans le chagrin ?
Vieille
Si déjà je pouvais être vieille
Pour qu'enfin ma douleur s'ensommeille
Vieille
Pour que le vent de la nuit balaye
Les soucis, les erreurs de la veille
Vieille
C'est vers le soir que l'on s'émerveille
Mais je n'en suis encore qu'à midi
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