Être seule a du bon mais on n'a que deux mains
Or, il est des moments où l'on en voudrait plein
Ainsi, lorsqu'il s'agit, sans espoir de rescousse,
De fourrer une couette au dedans d'une housse.
C'est, à n'en pas douter, labeur digne d'Hercule,
A l'exemple de qui n'avance pas, recule
On espère, on déchante, on pleure, on sue, on tousse,
Étouffée par la couette et bouffée par la housse.
Y-a-t-il seulement de stratégies qui vaillent, sous le fond et l'enfer des chambres de bataille
L'ennemi tente encore une sortie qu'on repousse
Mais à revers la couette vient délivrer la housse.
Agitant le pilou comme une muletta,
Dans l'arène où je vis mon tout dernier combat
A cinq heures du soir, torero andalous
Encornée par la couette et gisant sur la housse.
On se prend à rêver de formules magiques
A signer de son sang, un pacte satanique
Quitte à avoir le diable à jamais à ses trousses
Pour que la couette veuille bien entrer dans la housse.
Il paraît qu'il y a des astuces toutes bêtes
Des tutos pour le faire, y en a plein l'internet
Je les ai essayés mais j'ai pas mis de pouces
Devant la couette en boule tout au fond de la housse.
Les ressources de l'homme sont quasi infinies
Qui fait la sourde oreille, écrire des symphonies
Mais combien de Van Gogh, combien d'Amadeus?
Trouveront leur limite dans la couette et la housse.
J'admire ceux qui savent, ceux qui créent, ceux qui pensent
Ceux dont la plume alerte éveille nos consciences
Mais, à quoi bon Platon, Einstein ou Marcel Proust
Pour comprendre comment la couette va dans la housse.
Après quelques apnées et quelques hurlements,
Tout autant de jurons que de renoncements
On finira par foutre à la va comme j'te pousse
Cette putain de couette dans sa putain de housse.
Enfin, l'on peut s'étendre et pour prix du KO
Chercher à s'endormir, à trouver le repos
Mais sommeil agité, tremblements et secousses
On retrouve la couette bien trop loin de la housse.
A moins que de l'amour, on cherche réconfort
Dans ce lit accueillant, abandons et transports
En ayant dans nos fièvres, et comme on le fait tous,
Ni égard pour la couette ni respect de la housse.
Châtiment de Sisyphe que tourmente sans fin
Son fardeau dévalant du sommet presqu'atteint
Nous voilà condamnée au chemin qu'on rebrousse
A retirer la couette pour remettre la housse.
Quand nous n'en pouvons plus, quand nos larmes débordent
Espérant le miracle ou la miséricorde
Humblement à genoux lodote et dominus
Prions la sainte couette et bénie soit sa housse.
Même le bienheureux se doit d'être lucide
La vie n'est pas toujours un long fleuve placide
Ni même un frisson d'eau courant sur de la mousse
La vie est une couette qu'il faut mettre en sa housse.
Immuable le monde aime l'ordre des choses
Nous tenons la mortaise l'épine sur la rose
Les grains de la vanille aux secrets de la gousse
Et quoi qu'il nous en coûte la couette dans la housse. (bis)
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