O Mer, sinistre Mer que la bise d’automne
Secoue et fait claquer ainsi qu’un vain lambeau ;
O Mer, joyeuse Mer, magnifique manteau
Qu’agrafe le Soleil aux flancs nus de Latone ;
O Mer, sinistre Mer dont les gémissements
Troublent l’esprit nocturne attardé sur les grèves ;
O Mer, joyeuse Mer qui, pour bercer les rêves,
As des bruits de baisers et de chuchotements ;
O Mer, sinistre Mer, pleine de funérailles !
O Mer, joyeuse Mer que peuple un flot vivant !
- La Vie avec la Mort en toi semblent souvent
S’unir pour féconder tes profondes entrailles.
Es-tu la coupe immense où le philtre sacré
Des renouvellements opère son mystère,
Où viennent se tremper les forces de la Terre,
Pour embrasser la forme en faisceau plus serré ?
Es-tu le temple obscur de nos métamorphoses ?
Le Trésor infini des mouvements divers
Dont s’animent les corps épars dans l’univers,
Et des aspects sans fin que revêtent les choses ?
Puisque, sans te lasser, l’âpre travail du vent
Engloutit dans tes flancs de charnelles semailles,
O Mer, sinistre Mer, pleine de funérailles !
O Mer, joyeuse Mer que peuple un flot vivant !
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