Connais-tu l'herbe amère, le liseron la plante
Toute noire et très belle enroulée dans la gorge
Ô que quelqu'un la dise, ô que quelqu'un la chante
Simplement sur le bruit d'un cœur et d'une horloge
Et le train de Dunkerque au loin sur son refrain
Le chagrin
Cet animal familier, ce chien qui te traîne
Dans les couloirs et les vieux escaliers du corps
Il est un peu méchant pas très beau, mais tu l'aimes
Il tire vers les ponts le soir quand tu le sors
Et tu as beau être son maître, tu le crains
Le chagrin
Son couteau à douleur et sa gouge artisane
À sculpter des oiseux de bois sur les potences
Des épines aux lilas, des pétales aux larmes
Et tout le désespoir qu'il faut à l'espérance
C'est le meilleur de toi qui brille dans l'écrin
Du chagrin
Un jour il t'offrira son collier de morsures
Un jour demain ta main prendra dans la corbeille
Emplie de raisins ronds une grappe un peu sure
Il a de belles vignes il soigne bien ses treilles
Il a le temps pour lui, il presse grain par grain
Le chagrin
Laisse-le libérer ses sources sous tes cils
Son fleuve qui n'a que tes paupières pour grèves
Cet océan profond sans bateau et sans île
Qui met son grain de sel sur les phrases des lèvres
Tu peux lâcher la corde, il a le pied marin
Le chagrin
À se sentir lavé, presque beau, transparent
Aux bras des vieux matins édentés de la ville
À appeler encore son règne de tyran
Ses carrefours muets, ses grands théâtres vides
Le vent chargé de clous, le soleil souterrain
Du chagrin
Ami, pardon, c'est à ton rire que j'accroche
Son manteau qui me tient bien froid quand il fait froid
Et l'enveloppe bleue déchirée dans la poche
Éteignez en sortant et ne me plaignez pas
Plaignez plutôt celui que n'a jamais étreint
Le chagrin
Le chagrin
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