L’aube d’une clarté s’épanche dans mon âme.
Au mur de l’horizon j’ai vu luire une flamme.
Les lys soudain dans l’ombre ont frémi de ferveur
Et j’ai senti passer la robe du sauveur.
Je suis le voyageur endormi sur la route,
Las et le coeur sinistre, au carrefour du doute,
Suant l’angoisse au fond d’un cauchemar mortel,
Et qui, dans le matin dressé comme un autel,
D’un beau geste ébloui se réveille et se lève
À l’appel d’un grand ciel tout ruisselant de rêve !
Le verbe des hauteurs, ranimant mes pensers
Pareils après l’orage aux épis renversés,
Les redresse d’un seul frisson vers la lumière ;
Et mon coeur, comme un mort qui soulève sa pierre,
Mon coeur ressuscité bat sa vie à grands coups.
Car l’épouse mystique a retrouvé l’époux.
Ô mon âme, la nuit a lâché sa capture.
Tu peux encor tenter la divine aventure,
Et vers ton inconnu, d’un frémissant essor,
Monter légère au ciel comme une flèche d’or.
Va-t’en, va-t’en : déjà le vent de la Parole
Fait tressaillir ta chevelure qui s’envole
Et met la joie au coeur des chênes des forêts.
Va, belle, conquérir les magiques secrets,
Dont l’amour pour toi seule a soulevé les voiles.
L’amour t’attend, le grand papillon des étoiles…
Et flotte au large azur l’oriflamme d’argent,
L’ange a terrassé l’égoïsme intelligent,
La bête au ventre lourd, l’hydre à l’échine torse
Qui veut le mordre encore au talon et s’efforce…
Éveillée aux rayons, éventée aux fraîcheurs,
La mer spirituelle émerge des blancheurs
Avec des vols ravis d’âmes neuves encore
Comme des alcyons qui tournent dans l’aurore :
La mer spirituelle aux vagues de clarté
Où monte ton soleil vivant, ô Vérité !
Quand je marchais, perdu, l’oeil plein d’un couchant sombre,
Une main de lumière a pris ma main dans l’ombre
Et m’a conduit le long du mystique sentier,
Aux jardins où jaillit la source de pitié,
Sous les palmes d’où tombe une paix angélique.
Alors j’ai revêtu la candide tunique
Et l’espoir des enfants a visité mon coeur,
Ô mon âme, sois donc forte et fuis la langueur
L’âme s’englue au miel du rêve et de la flûte.
La vie est à ce prix : roidis-toi pour la lutte.
N’attends pas vainement : ton futur t’appartient.
Tiens-toi toujours debout pour celui-là qui vient
Et dont sur les chemins les pieds gravent l’exemple.
Sois le prêtre vêtu de blanc au seuil du temple,
Pur et qui tend les bras vers le soleil levant !
L’aile des envoyés palpite dans le vent,
L’étoile brille au ciel entre toutes bénie,
Et voici revenus les temps d’épiphanie.
Puisque la moisson croît pour l’éternel semeur,
Puisque le lys fleurit en loyal serviteur,
Je veux donner ma vie à la Bonne Espérance,
À la règle, à l’effort, à la persévérance,
L’ennoblir de sagesse, et de force l’armer,
L’alléger de prière et toute l’enfermer
Dans la soif de comprendre et la splendeur d’aimer.
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