La famille nombreuse, et par les dieux comblée,
Tout autour de la table est encor rassemblée :
Elyone au long col, Lydie aux seins naissants,
Nyza dont la voix triste a de si purs accents,
Myrte agile et robuste, Ixène douce et blanche.
La mère aux lourds bandeaux sur les petits se penche ;
Myrte rit aux éclats ; Ixène jette un cri ;
Et le père accoudé sur la table sourit
Le jour fut accablant ; par la fenêtre ouverte
Un peu de brise vient de la route déserte ;
La campagne s’endort dans l’or des soirs d’été.
Et le mystère monte avec l’obscurité
L’âme pensive au lent adieu de la lumière :
Chante, dit à Nyza la voix grave du père ;
Et, regardant là-bas briller les derniers feux,
Il baise avec lenteur l’enfant sur ses cheveux.
Entre ses soeurs Nyza de son père est chérie ;
Sa voix semble toujours pleurer une patrie.
Elle a treize ans ; un soir d’amour, la Volupté
De nuit et de lumière a pétri sa beauté.
Son petit front de marbre a l’horreur des servages,
Et, douce, elle sourit avec des yeux sauvages.
Elle chante ; ce sont des rondes d’anciens jours,
Des airs simples appris, le soir, dans les faubourgs.
Sa bouche exquise semble un calice qui s’ouvre ;
Et sa voix, que toujours un peu de brume couvre,
Monte et s’exhale ainsi qu’un triste et pur soupir
Au fond du grand silence où le jour va mourir !
Elyone et Lydie, aux limpides pensées,
Se tiennent doucement par la taille enlacées ;
Le petit Myrte dort, la tête sur son bras ;
Et le père, sachant qu’on ne le verra pas,
Faisant tourner un verre avec sa main distraite,
Laisse errer dans ses yeux une larme secrète
Sur le seuil, la servante, oubliant ses travaux,
N’a point encore à table apporté les flambeaux.
Tout est noir ; le grand ciel brille de feux sans nombre;
Par instants, sur la route, un pas sonne, dans l’ombre
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