En lui envoyant une pensée
Au temps où vous m’aimiez (bien sûr ?),
Vous m’envoyâtes, fraîche éclose,
Une chère petite rose,
Frais emblème, message pur.
Elle disait en son langage
Les » serments du premier amour « ,
Votre coeur à moi pour toujours
Et toutes les choses d’usage.
Trois ans sont passés. Nous voilà !
Mais moi j’ai gardé la mémoire
De votre rose, et c’est ma gloire
De penser encore à cela.
Hélas ! si j’ai la souvenance,
Je n’ai plus la fleur, ni le coeur !
Elle est aux quatre vents, la fleur.
Le coeur ? mais, voici que j’y pense,
Fut-il mien jamais ? entre nous ?
Moi, le mien bat toujours de même,
Il est toujours simple. Un emblème
A mon tour. Dites, voulez-vous
Que, tout pesé, je vous envoie,
Triste sélam, mais c’est ainsi,
Cette pauvre négresse-ci ?
Elle n’est pas couleur de joie,
Mais elle est couleur de mon coeur ;
Je l’ai cueillie à quelque fente
Du pavé captif que j’arpente
En ce lieu de juste douleur.
A-t-elle besoin d’autres preuves ?
Acceptez-la pour le plaisir.
J’ai tant fait que de la cueillir,
Et c’est presque une fleur-des-veuves