Talus, remblais, lieux vides, gravats
Paul Celan

Poème Talus, remblais, lieux vides, gravats

Gain de lumière, mesurable, ressemblant
au chardon :
Un peu
de rouge, en discussion
avec un peu de jaune.

Le voile de l’air devant
ton œil désespéré.
Le dernier grain de sable
chevauchant.
(les
massifs de fleurs, autrefois,
les mots tout sourire du Marchfeld,
de l’herbe des steppes là-bas.
le manège mort, sonne.
Nous tournions encore et encore.)

La chevauchée du grain de sable, l’œil,
à elle habilement lié.

Les portes des heures et
leurs bruissements.

Le monde, avançant
vers nous dans l’heure vide :

Deux
troncs d’arbres, noirs,
sans branche, sans
nœud.

Et dans la traînée du réacteur, coupante,
une pale isolée.

Nous aussi, dans le vide,
nous nous tenons près des drapeaux