Dans la splendeur dorée et cruelle du soir
Les taureaux, fronts crépus et sanglantes paupières,
Se hâtant lourdement sous les sombres lanières,
Mélancoliquement s’en vont à l’abattoir.
Auprès d’eux, dominant le troupeau du trottoir,
Les beaux bouchers, casqués de vivaces crinières,
S’avancent, déployant de puissantes manières,
Et vont roulant le torse en un lourd nonchaloir.
Sur le tas moutonnant de cornes indomptées
Flottent d’âcres senteurs d’étables, fermentées ;
Et d’épais beuglements montent, confus et sourds.
Et, fils pâle d’un âge, où la force succombe,
Je sens en moi devant la farouche hécatombe
Ressusciter l’orgueil brutal des anciens jours.