A hurler
Aimé Césaire

Poème A hurler

Salut oiseaux qui fendez et dispersez le cercle des hérons
et la génuflexion de leur tête de résignation
dans une gaine de mousse blanche

Salut oiseaux qui ouvrez à coups de bec le ventre vrai du marais
et la poitrine de chef du couchant

Salut cri rauque
torche de résine
où se brouillent les pistes
des poux de pluie et les souris blanches

Fou à hurler je vous salue de mes hurlements plus blancs que la mort

Mon temps viendra que je salue
grand large
simple
où chaque mot chaque geste éclairera
sur ton visage de chèvre blonde
broutant dans la cuve affolante de ma main
et là là
bonne sangsue
là l’origine des temps
là la fin des temps

et la majesté droite de l’oeil originel